Article sur Kirby’s Adventure réalisé dans le cadre des Trésors du Nintendo Switch Online.
- Également connu sous le titre de Hoshi no Kirby: Yume no Izumi no Monogatari
- Action | Plateforme
- Développé par HAL Laboratory | Édité par Nintendo
- Sorti le 23 mars 1993
- NES | Wii | Wii U | Switch
- Entièrement localisé en français
- PEGI 3
- Toute l’actualité du jeu | de la série
Les Trésors du Nintendo Switch Online
Depuis le 19 septembre 2018, Nintendo enrichit les catalogues du Nintendo Switch Online + Pack additionnel. Le service comporte plus d’une centaine de jeux issus des ludothèques NES, Super Nintendo, Nintendo 64, Game Boy, Game Boy Advance et Mega Drive. Parmi ces titres, notre rubrique a vocation à révéler les Trésors du Nintendo Switch Online.
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Rétrospective de Kirby’s Adventure
Avec Kirby et le monde oublié, sorti sur Switch en 2022, on a parfois parlé de révolution dans la série. Pour la première fois depuis 1991, on explorait des environnements en 3D, modifiant profondément l’approche que l’on avait de Kirby jusqu’alors. Mais longtemps avant lui, un autre épisode avait déjà transformé la série à tout jamais. Il s’agit de Kirby’s Adventure, l’épisode NES sorti en 1993, qui introduisait l’incontournable capacité de copie.
Peu après la sortie de Kirby’s Dream Land sur Game Boy sortait déjà un deuxième épisode. Il s’agit du célèbre Kirby’s Adventure, édité en 1993 sur NES. Car une fois n’est pas coutume, Kirby s’est d’abord fait la main sur la monochrome de Nintendo. À cette époque pourtant, les jeux faisaient surtout le trajet inverse. Les plus grands succès domestiques étaient plus tard adaptés à la console portable, comme Super Mario Land, Castlevania: The Adventure ou Mega Man: Dr. Wily’s Revenge.
HAL Laboratory était au bord de la faillite
Avec Kirby’s Dream Land, HAL Laboratory, alors plus communément connu sous le nom de HALKEN, tenait possiblement son premier « hit ». Cette année-là, le studio de Satoru Iwata était en grande difficulté financière. Ses jeux de niche, tels HyperZone ou Arcana disponibles depuis peu sur Super Nintendo, étaient extrêmement difficiles à vendre. Mais Kirby’s Dream Land s’adressait à un public plus large. Plus tard, Masahiro Sakurai expliquera que les ordinateurs servant au développement de Kirby’s Adventure étaient étiquetés puisqu’ils devaient être saisis, l’entreprise étant insolvable.
Quel était l’état d’esprit de l’équipe ? On peut imaginer qu’un sentiment d’urgence existait. Quand le développement a débuté en 1992, HAL Laboratory a préféré développer une version NES plutôt que Super Nintendo, pourtant sur le marché depuis plus d’un an. Masahiro Sakurai expliquera même penser que le jeu aurait plutôt dû s’adresser à de jeunes joueurs, tandis que ceux de la 8 bits étaient davantage des vétérans. Mais la maîtrise des outils et de l’environnement ainsi que le parc installé ont favorisé une sortie NES, pour espérer des ventes massives et plus rapides.
Malgré la situation périlleuse dans laquelle le studio se trouvait, HAL Laboratory avait de grandes raisons de croire en un succès de Kirby’s Adventure. Le premier épisode sur Game Boy avait trouvé son public et Nintendo soutenait le projet. Hiroshi Yamauchi, alors PDG du constructeur, n’a dès lors jamais manqué d’expliquer qu’il avait littéralement sauvé une petite entreprise sans le sou pour en faire un grand studio, tel qu’on le connaît aujourd’hui. Car en plus de Satoru Iwata, à la fois producteur et programmeur-assistant sur le jeu, Shigeru Miyamoto et Takao Shimizu ont aussi chapeauté le projet.
Synopsis
Kirby’s Adventure aurait dû être une conversion en couleurs de Kirby’s Dream Land. Mais l’équipe derrière ce portage a souhaité profiter des capacités supérieures de la 8 bits pour développer le gameplay. Il s’agit donc plutôt d’une suite, même si la chronologie n’a pas une grande importance.
Le jeu se déroule à Dream Land où les habitants dorment et rêvent paisiblement grâce à la Fontaine des Rêves. Les joueurs de Super Smash Bros. Melee connaissent bien ce lieu puisqu’un stage lui est dédié. Un jour néanmoins, les rêves cèdent leur place à des cauchemars à cause du Roi DaDiDou qui s’y baigne. La fontaine tire son pouvoir du Bâton Étoile que l’immense pingouin a aussi brisé, pour confier ses morceaux aux différents boss de fin de niveau. Pour rappel, le Roi DaDiDou est le principal antagoniste de Kirby’s Dream Land. Cet épisode introduit également Meta Knight, un étrange épéiste portant un masque. Ses motivations ne sont pas claires. Il combat Kirby parfois en invoquant des mini-boss dans chaque monde. D’autres fois, il l’aide en lui fournissant une Super Sucette, un objet qui a le même effet qu’une étoile d’invincibilité des jeux Mario.
Kirby’s Adventure s’appuie pleinement sur Kirby’s Dream Land
Une grande partie du gameplay de Kirby’s Adventure est directement issue de Kirby’s Dream Land. On retrouve des mécaniques et un feeling quasiment identiques. Kirby peut toujours aspirer ses ennemis ou certains objets pour les recracher sous forme de projectiles. Il peut surtout avaler de l’air pour s’envoler légèrement, ce qui permet d’éviter de très nombreuses plateformes. Par ailleurs, la résolution du jeu passe de 160 × 144 à 256 × 240 pixels, mais les développeurs n’ont pas augmenté la taille du sprite de Kirby. Il est donc encore plus rentable de flotter pour contourner les pièges. Pour limiter les abus, un bandeau sur le bas de l’écran encadre le jeu.
Cela rend-il Kirby’s Adventure plus facile encore que le premier épisode ? À ce propos, les développeurs ont souvent répété que le principal reproche formulé au jeu était d’être « trop facile et trop court ». D’un autre côté, cela explique aussi son succès auprès du grand public. HAL Laboratory a donc opté pour une démarche inclusive tant pour les débutants que les joueurs confirmés. C’est pourquoi Kirby dispose de nouveaux mouvements qui offrent de nouvelles façons de jouer.
Masahiro Sakurai n’a toutefois pas renié son idée d’origine. Le point de départ de Kirby’s Dream Land était d’utiliser les ennemis. Dans Kirby’s Adventure, ce concept a évolué et s’est complexifié grâce à la capacité de copie. En engloutissant des ennemis en particulier, le joueur peut imiter et utiliser leurs attaques. Bien sûr, il est toujours possible de jouer comme sur Game Boy, sans se soucier des transformations de Kirby. Mais celles-ci offrent différentes mécaniques, plus ou moins difficiles selon le niveau. Les joueurs à la recherche d’une expérience alternative peuvent donc trouver de multiples façons de terminer un niveau.
La capacité de copie
Avec le temps, cette capacité de copie est devenue la signature de Kirby. Le concept a depuis été poussé à l’extrême, y compris dans d’autres séries comme dans Super Mario Odyssey, qui permet de prendre possession de n’importe quel ennemi. Mais en 1993, c’était la première fois que l’on pouvait copier les attaques avec un tel panel disponible. Les développeurs ont initialement imaginé quarante capacités. Mais dans le jeu final, Kirby a finalement accès à vingt-six transformations.
Par exemple, il peut cracher des flammes ou devenir une boule de feu. On peut aussi le transformer en roue ou en soucoupe volante. D’autres ennemis lui donnent la capacité d’effectuer un super-saut, ou d’attraper et de jeter des objets. Aujourd’hui, peut-être que cela n’a rien d’exceptionnel. Mais à l’époque, il fallait programmer toutes ces actions car il n’existait pas de moteur physique prêt à l’emploi ou d’outils préconçus. C’est-à-dire qu’en 1993, HAL Laboratory maîtrisait largement la NES, après avoir participé à une vingtaine de jeux. Et chaque attaque occupait un peu d’espace sur une cartouche de 768 Kb. Kirby’s Adventure est à ce jour le jeu disposant du plus de mémoire sur NES.
Bien sûr, la capacité de copie donne de la profondeur au héros qui bénéficie de dizaines et dizaines d’animations. Les ennemis gagnent aussi en caractère. Ceux qui peuvent être copiés sont plus travaillés que les ennemis de base, comme les Waddle Dees qui ne donnent pas lieu à une transformation. Voilà pourquoi Bandana Waddle Dee, qui apparaîtra dans Kirby’s Fun Pack, est exceptionnel pour l’un de son espèce. Les boss et leurs patterns ont aussi plus de sens, car on les appréhende différemment en fonction du pouvoir. L’environnement aussi est davantage complexe. Kirby’s Dream Land était extrêmement linéaire. Dans Kirby’s Adventure, certains stages présentent des secrets auxquels on ne peut accéder qu’à l’aide d’une capacité bien spécifique.
Des mini-jeux à un bouton
Une autre nouveauté de Kirby’s Adventure est l’apparition de trois mini-jeux. Dès lors qu’on les découvre au cours de l’aventure, il est possible d’y accéder depuis l’écran-titre. Leur cahier des charges est simple. Ils ne doivent utiliser qu’un seul bouton pour être accessibles à n’importe qui. Dans Gobœuf, le joueur garde la bouche de Kirby ouverte en appuyant sur A pour avaler un maximum d’œufs. Il faut cependant relâcher le bouton quand le Roi DaDiDou lance une bombe. Grue est un clone des UFO Catchers où il faut appuyer au bon moment pour déplacer la pince. Dans Duel enfin, Kirby affronte de multiples adversaires, façon western, et le joueur doit dégainer au bon moment.
Ces activités sont complètement facultatives car elles apparaissent sur la carte du monde. Si le joueur n’est pas intéressé, il peut les éviter et simplement emprunter la porte du stage suivant. Mais en l’absence d’un mode multi, ces mini-jeux peuvent fédérer plusieurs joueurs autour de l’écran, quelle que soit leur expérience. N’importe qui peut s’amuser avec. D’une certaine manière, ces mécaniques épurées à l’extrême préfigurent les bonus des jeux Wario Land, puis les fameux WarioWare, gavés de micro-jeux, qui sortiront quelques années plus tard.
Même au cours de l’aventure, Kirby termine chaque stage avec un mini-jeu où le joueur doit sauter le plus haut possible à l’aide d’un trampoline prévu à cet effet. En maintenant et en relâchant la touche aux bons moments, on peut franchir plusieurs étages et obtenir des vies supplémentaires. Ces segments donnent l’occasion à Kirby d’effectuer sa fameuse chorégraphie. Mais ils rythment surtout une progression qui ne manque jamais de se renouveler, grâce à une variété de mécaniques bienvenue.
La NES offre une expérience plus riche
Car Kirby’s Adventure est nettement plus long que Kirby’s Dream Land. Selon HowLongToBeat, la durée de vie passe de quarante-cinq minutes à trois heures et demie environ. Et pourtant, il n’est pas plus répétitif grâce à ces à-côtés. Les différentes transformations, les mini-jeux, les combats d’arène ou la carte du monde renouvellent l’aventure. Cette dernière est composée de huit mondes de quatre à six stages. Cela segmente véritablement l’expérience. Chaque stage est lui-même découpé en différentes zones, pas toujours homogènes d’ailleurs et qui donnent l’impression d’un patchwork. On retrouve toujours cet esprit dans les épisodes les plus récents, tels que Kirby Star Allies ou Kirby et le monde oublié.
On passe donc assez régulièrement d’un environnement à un autre. À l’époque de Super Mario Bros., les développeurs utilisaient des palet swaps entre buissons et nuages pour économiser de la mémoire. Pour Kirby’s Adventure, HAL Laboratory ne s’est pas imposé de telles limites. Takashi Saitō, designer du jeu, et Satoru Iwata ont plus tard expliqué l’importance des décors. Ceux-ci devaient être jolis à regarder tout simplement, indépendamment du jeu. Avant même de concevoir les niveaux, un designer les dessinait puis un mapper les intègrait finalement.
Parfois, quelques assets sont un peu génériques et on ne distingue pas toujours les stages les uns des autres. C’est-à-dire qu’en l’absence de biomes tels qu’une jungle, un volcan ou un désert par exemple, les scènes ont parfois tendance à se ressembler. Mais plusieurs d’entre elles sont de véritables merveilles techniques. On pense à la tour qui tourne à 360°, rappelant le vénérable Nebulus. D’ailleurs, la NES s’agenouille souvent en raison de ralentissements sévères.
L’héritage de Kirby’s Adventure
Pour l’anecdote, c’est aussi la première fois que Kirby apparaît en Europe sous sa couleur rose, désormais habituelle. Aussi étonnant que cela puisse paraître, il était entièrement blanc sur le boîtier occidental de Kirby’s Dream Land. Et comme les graphismes étaient monochromes, on ne pouvait pas le deviner. Au Japon toutefois, l’illustration du jeu le représentait déjà tel qu’on le connaît désormais, sous la forme d’une petite boule rose.
Mais Kirby’s Adventure est surtout historique pour introduire la capacité de copie. Dès lors, tous les jeux qui incluent Kirby s’approprieront cette particularité, comme Super Smash Bros. où il peut imiter Link, Samus Aran ou Donkey Kong. Au fil des épisodes, il sera possible de chevaucher des montures (Kirby’s Dream Land 2) ou de combiner des pouvoirs entre eux (Kirby 64 : The Crystal Shards). Certains adopteront des mécaniques inédites comme le tracé de Kirby : Le Pinceau du Pouvoir ou la représentation façon pelote de laine de Kirby : Au fil de l’aventure. Mais jusqu’à sa transition en 3D de 2022, la révolution la plus importante de la série n’est autre que cette capacité de copie qui lui donne toute son identité.
Aujourd’hui, Kirby’s Adventure fait partie des plus grands classiques de Nintendo. Il a même eu droit à un remake complet sur Game Boy Advance. Kirby : Cauchemar au Pays des Rêves rafraîchit le gameplay, la direction artistique et comporte de nouveaux contenus. Pour une expérience plus authentique, il est aujourd’hui possible d’y jouer sur 3DS grâce à 3D Classics Kirby’s Adventure. Cette conversion d’ARIKA permet d’apprécier le jeu d’origine avec du relief, grâce aux fonctionnalités stéréoscopiques. Le titre est également disponible sur Switch dans le cadre du Nintendo Switch Online. Il est accompagné d’une version EX qui permet de jouer d’emblée au niveau de difficulté le plus élevé.
Sources
- Retronauts | With HyperZone, HAL Labs hurtled toward bankruptcy
- shmuplations | Kirby’s Adventure – 1993 Developer Interview
- The Video Game Museum | NES Gamepics
- YouTube | Masahiro Sakurai on Creating Games – Kirby’s Adventure [Game Concepts]